
Change management : l’angle mort qui coûte cher
Les entreprises mènent leurs transformations avec les méthodes classiques du change management. Utiles pour structurer, elles échouent pourtant à provoquer un réel basculement. Pourquoi ? Parce qu’elles contournent l’essentiel : la culture organisationnelle, ce système invisible de croyances et d’habitudes qui détermine la réussite ou l’échec du changement.
La culture, levier stratégique
Les recherches d’Edgar Schein, Gerry Johnson et Peter Senge convergent : les résistances au changement ne sont pas rationnelles. Elles naissent des croyances partagées, des routines collectives et des récits implicites qui structurent la vie d’une organisation.
Ignorer ces dimensions, c’est condamner une transformation à rester cosmétique : les structures changent, mais les comportements et les logiques profondes demeurent.
Le véritable enjeu est donc d’articuler structure et culture.
Les plans de transformation donnent un cadre ; le travail culturel en assure la profondeur et la durabilité.
Cela passe par un travail d’exploration
Avant d’agir, il faut comprendre ce qui fait tenir ou résister le système.
- Cartographier les routines : ce que l’on fait sans y penser, mais qui façonne le quotidien.
- Explorer les récits collectifs : les histoires partagées qui expriment “qui nous sommes” et “ce qui compte ici”.
- Mettre au jour les modèles mentaux : les croyances tacites qui orientent les décisions et nourrissent les résistances.
Ce travail d’exploration demande une approche qualitative, sensible et systémique.
Les DRH et les managers y jouent un rôle central : créer des espaces d’écoute, valoriser la parole des équipes et accompagner la mise en lumière des représentations collectives.
… puis par une transformation culturelle
L’exemple d’ING (Pays-Bas) illustre cette articulation réussie entre structure et culture.
En 2015, la banque engage une transformation à grande échelle pour devenir plus agile face à la concurrence des fintechs. Elle réorganise ses équipes en squads pluridisciplinaires, regroupées en tribes, afin de réduire la hiérarchie et de responsabiliser les collaborateurs de bout en bout.
Mais la clé du succès n’a pas été structurelle, elle a été culturelle :
- Passer du contrôle à la confiance, en donnant une réelle autonomie aux équipes.
- Encourager l’expérimentation, le feedback rapide et l’apprentissage continu.
- Rapprocher IT, métiers et opérations via les pratiques DevOps, pour briser les silos.
- Installer des rituels de transparence et de co-localisation, renforçant communication et alignement collectif.
Ces leviers ont permis de créer un environnement où la culture soutient la stratégie, au lieu de la freiner.
Résultat :
- un engagement accru,
- une réactivité renforcée face aux besoins clients,
- une réduction du time-to-market pour les produits digitaux.
Aujourd’hui, ING est citée comme une référence européenne pour avoir su conjuguer transformation structurelle et transformation culturelle.
En conclusion : la transformation culturelle ne se décrète pas
Travailler sur la culture, c’est accepter de descendre au niveau des croyances, des émotions et des interactions collectives.
Ce n’est pas une affaire de communication, mais d’accompagnement en profondeur.
C’est pourquoi un coaching d’organisation est souvent nécessaire : il permet de relier la stratégie au vécu, de créer les conditions d’un apprentissage collectif et d’aider l’organisation à se transformer de l’intérieur, sans imposer un modèle extérieur.
Le coaching d’organisation agit comme un miroir systémique : il aide les équipes à voir ce qu’elles ne voient plus, à redonner du sens aux actions et à transformer la culture sans la violenter.
À retenir
- Pas de transformation durable sans travail culturel.
- La culture n’est pas une “soft issue”, mais un actif stratégique.
- Le coaching d’organisation en est le catalyseur, car il reconnecte structure, culture et sens.
- Articuler cadre et culture, c’est ancrer durablement le changement dans les pratiques et les représentations.
Comme le résume Edgar Schein :
“If you don’t manage culture, it manages you.”
Si vous ne gérez pas la culture, c’est elle qui vous gère.
